Prescription trentenaire invoquée par la partie adverse.

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Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Bonjour,

Il y a dix ans, j'ai acheté un terrain au dessus de ma maison sur lequel tombe les eaux pluviales du toit d'un voisin. Depuis dix ans, je lui demande de mettre une gouttière pour récupérer ses eaux. Il s'y refuse en faisant jouer la prescription trentenaire.

Je vous précise bien que le toit en question surplombe mon terrain et que les eaux qui en découlent tombent directement sur mon terrain.

Il y a quelques années, j'ai donc été obligé de construire un système d'évacuation des eaux (qui passe sous ma maison)afin d'éviter tout problème d'engorgement du terrain au dessus. Et j'ai renouvelé ma demande de pose de gouttières. Même réponse.

J'ai confié le dossier au service protection juridique de mon assurance en expliquant que la non récupération des eaux pluviales par mon voisin provoquait un préjudice (humidité, chutes de pierres et de lauses...) et risquait de boucher mon système d'évacuation des eaux pouvant potentiellement provoquer des dègats beaucoup plus graves.

Mon assurance a envoyé deux courriers de mise en demeure: le premier à mon voisin (resté sans effet autre que son transfert à sa propre assurance) le second à l'assurance adverse resté à ce jour sans réponse. Cela fait dix huit mois que mon assurance a été saisie de ce dossier.

Apparemment, la partie adverse continue à faire jouer la prescription trentenaire et mon assurance n'a pas l'air très pressée (malgré ses courriers assez "musclés") d'engager une procédure, voire de commander une expertise.

Que puis je faire ? Je vous remercie vivement pour vos conseils.

Cordialement,

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Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,
Citation :

J'ai confié le dossier au service protection juridique de mon assurance en expliquant que la non récupération des eaux pluviales par mon voisin provoquait un préjudice (humidité, chutes de pierres et de lauses...) et risquait de boucher mon système d'évacuation des eaux pouvant potentiellement provoquer des dègats beaucoup plus graves.

Mon assurance a envoyé deux courriers de mise en demeure: le premier à mon voisin (resté sans effet autre que son transfert à sa propre assurance) le second à l'assurance adverse resté à ce jour sans réponse. Cela fait dix huit mois que mon assurance a été saisie de ce dossier.

Mon assurance a envoyé deux courriers de mise en demeure: le premier à mon voisin (resté sans effet autre que son transfert à sa propre assurance) le second à l'assurance adverse resté à ce jour sans réponse. Cela fait dix huit mois que mon assurance a été saisie de ce dossier.


Votre assurance n'est pas pressée très vraisemblablement parce que comme toujours, elle rechigne à engager des frais pour aller devant un tribunal. Cela coûte des frais à votre assurance que cette dernière préfère éviter "autant que faire ce peu".

Vous êtes pourtant parfaitement dans votre droit mais vous devez déjà le savoir (article 681 du Code civil).

En conséquence, le mieux à faire est de presser votre assurance à vous fournir un avocat afin d'engager une action judiciaire devant le tribunal de grande instance. En effet, si l'assurance refuse de faire droit à votre demande, alors elle engage sa responsabilité contractuelle sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil.


Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Madame, monsieur

Ces informations sont encourageantes.

Mais est ce que l'argument de la prescription trentenaire est recevable ? N'est ce pas risqué d'engager une procédure si le juge donne raison à la partie adverse pour cette raison ?

J'ai lu qu'une prescription devait être continue et apparente. Quand on ne pose pas de gouttières, c'est bien le cas.

En vous remerciant pour votre appréciation sur ce point du dossier,

Bien cordialement

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,
Citation :

Mais est ce que l'argument de la prescription trentenaire est recevable ?


Je sais pas, vous ne m'avez pas dit depuis quand le problème durait hormis le fait que vous aviez acheté cette maison il y a dix ans!

Au reste, il est vrai que le droit de déverser les eaux sur le terrain voisin peut s'acquérir par prescription: Cass. 1ère Civ., 9 OCtobre 1963, Bull. I, n°425, page 364.


Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Madame,Monsieur

Merci pour votre réponse.

Le bâtiment concerné n'a jamais eu de gouttières en effet.

Mais par rapport à une jurisprudence confirmant la prescription trentenaire, trois éléments nouveaux sont cependant intervenus:

- je suis devenu propriétaire de la parcelle en contrebas (en forme de cour) il y a seulement dix ans. Ma première demande de pose de gouttières date de cette époque.

- j'ai été obligé de l'aménager (il y a cinq ans environ) avec un système de récupération des eaux (deux tuyaux qui passent sous ma maison) et dans lequel se déversent toutes les eaux pluviales. Ce système risque de s'engorger et de se boucher si mon voisin ne récupère pas ses eaux qui se déversent sur mon terrain puis dans mon système. Ce qui provoquerait de graves dommages à tout le monde.

- son bâtiment étant abandonné, les chutes de lauses, de morceaux de toiture entrainées par les eaux pluviales de son toit risquent de blesser quelqu'un en contrebas

Est ce que ces arguments suffisent pour invalider la prescription trentenaire ?

Est ce que vous pensez que les chances d'obtenir une décision favorable d'un juge sont réunies ?

Bien sûr, je comprends bien que, sur ce dernier point, votre avis n'est que indicatif, ce d 'autant plus que vous n'avez pas étudié le dossier en détail, et qu'il ne constitue pas quelque engagement que ce soit de la part de votre structure.

Je vous remercie pour ces dernières clarifications.

Très cordialement,

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,

Citation :

- son bâtiment étant abandonné, les chutes de lauses, de morceaux de toiture entrainées par les eaux pluviales de son toit risquent de blesser quelqu'un en contrebas

Est ce que ces arguments suffisent pour invalider la prescription trentenaire ?

Est ce que vous pensez que les chances d'obtenir une décision favorable d'un juge sont réunies ?


La prescription constitue une fin de non-recevoir. Cela signifie qu'elle a vocation à s'appliquer dès lors qu'elle est invoquée par le voisin, sans que le juge ait pouvoir quelconque de "l'invalider".

Le seul moyen de forcer les travaux serait de passer par une autre voie. Je m'explique. Vous ne pouvez plus attaquer le voisin pour l'absence de gouttière dans la mesure où sa construction a plus de trente ans. Par le jeu de la prescription, votre voisin dispose donc aujourd'hui d'une servitude dite "d'égouts des toits".

Cela étant, une telle servitude ne permet pas à votre voisin de mettre votre fonds en difficulté notamment en raison de la chute des lauses et des morceaux de toitures. De tels chutes ne sont pas comprises dans la servitude de passage et il serait possible d'agir en justice afin de contraindre votre voisin à empêcher de telles dégradations.



Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Madame, monsieur

Merci pour votre réponse. Deux dernières questions:

- Existe t-il, dans la jurisprudence, des cas pour lesquels une prescription trentenaire invoquée par le défendeur pour ne pas se soumettre aux injonctions du plaignant ou du demandeur n'ait pas été prise en compte par le juge ? Je veux dire, est ce assez fréquent ou vraiment exceptionnel ?

- Si c'est assez fréquent (du domaine du possible), quelle est en général la nature et la tangibilité des préjudices mis en avant par le plaignant pour remettre en cause la prescription trentenaire : odeurs, esthétique, bruit, humidité, sécurité... ?

En vous remerciant pour ces dernières informations complémentaires

Très cordialement

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,
Citation :


- Existe t-il, dans la jurisprudence, des cas pour lesquels une prescription trentenaire invoquée par le défendeur pour ne pas se soumettre aux injonctions du plaignant ou du demandeur n'ait pas été prise en compte par le juge ? Je veux dire, est ce assez fréquent ou vraiment exceptionnel ?


Le juge étant tenu par la loi, il ne peut pas ignorer la prescription trentenaire et la rejeter sous peine de voir le jugement annulé en appel ou en cassation.

Une prescription ne peut jamais être remise en cause.

Dans votre cas, il ne s'agit pas de vous opposer à la prescription mais simplement de demander la préservation de votre bien en raison d'un fait nouveau : ici, la chute d'objets autres que "l'eau de pluie".


Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Chére Madame ou cher monsieur,

Votre explication est très claire et je vous en remercie.

Dernier point cependant. Quand j'ai acheté cette "cour" il y a dix ans, il n'y avait pas de gouttière et les eaux de mon voisin se déversaient en contrebas dans la nature et dans une ruine qui ne m'appartenait pas.

En parallèle à l'achat de la cour, il y a donc dix ans, j'ai aussi acheté ses ruines et les terrains avoisinants, déposé un permis de construire et en fait "fermé" le bas de la cour.

D'ou le système d'évacuation des eaux qui passe désormais sous ma maison (neuve) et dont j'ai peur qu'il se bouche du fait de la non récupération des eaux du toit par mon voisin.

Si je suis votre raisonnement, je peux donc peut-être demander au juge d'assurer la préservation de mon bien pour deux faits nouveaux :

-1) ce bien n'existait pas il y a trente ans. Il a été construit avec l'aval de l'administration et depuis cette date, il souffre d'un écoulement exagéré d'eau qui provoque des dommages (humidité, risque d'inondation s'il devait se boucher..)

-2) l'usage de ma cour est devenu dangereux du fait de la chute de pierres et de lauzes venant du toit puisque le bâtiment est abandonné. Mais à la limite le juge peut demander à ce que le voisin refasse son toit (pas qu'on mette une gouttière)

Je demande donc au juge 1) la pose de gouttières pour résoudre mon (nouveau) problème d'eau et 2) la réfection du toit pour assurer la sécurité du lieu...

Pensez vous que l'on puisse ainsi "enrichir" et structurer notre demande ? (car tout seul l'argument no2 me parait faible)

En vous remerciant pour votre réponse qui devrait clore cet échange. Je ne veux pas abuser sur votre temps

Merci beaucoup en tout cas pour les autres renseignements sur la prescription trentenaire. Je ne savais pas tout cela.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,
Citation :

Si je suis votre raisonnement, je peux donc peut-être demander au juge d'assurer la préservation de mon bien pour deux faits nouveaux :

-1) ce bien n'existait pas il y a trente ans. Il a été construit avec l'aval de l'administration et depuis cette date, il souffre d'un écoulement exagéré d'eau qui provoque des dommages (humidité, risque d'inondation s'il devait se boucher..)


Ce point ne peut pas être évoqué du fait que les servitudes concernent des "fonds" qu'ils soient construits ou non. Autrement dit, que votre maison soit neuve n'a pas d'incidence. A partir du moment où les eaux se déversent depuis plus de trente ans sur ce terrain, alors il y a prescription acquisitive de la servitude.
Citation :

2) l'usage de ma cour est devenu dangereux du fait de la chute de pierres et de lauzes venant du toit puisque le bâtiment est abandonné. Mais à la limite le juge peut demander à ce que le voisin refasse son toit (pas qu'on mette une gouttière)


Vous avez bien compris.
Citation :

Pensez vous que l'on puisse ainsi "enrichir" et structurer notre demande ? (car tout seul l'argument no2 me parait faible)


Vous pouvez toujours prendre un avocat pour construire votre dossier. Peut être que de nouvelles idées germeront dans son esprit mais il est vrai que je suis pas super optimiste.
Citation :

Merci beaucoup en tout cas pour les autres renseignements sur la prescription trentenaire. Je ne savais pas tout cela.


C'est moi qui vous remercie pour vos propos.

Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher Monsieur,

Dernière tentative pour vous (me) rendre plus optimiste...

Est ce que je peux argumenter que la non récupération des eaux crée un trouble anormal de voisinage (ce qui n'était pas le cas bien sur quand le fonds était en ruine et inhabité): humidité, esthétique, chute de pierres, bruit, pollution, etc...

C'est à dire ne pas attaquer la prescription trentenaire elle même mais le trouble de voisinage qu'elle crée désormais ? Ne pas demander au voisin de récupérer ses eaux pluviales (puisqu'il y a prescription) mais lui demander de mettre fin au préjudice créé ? Après tout, il lui suffit de changer la pente de son toit sans mettre de gouttières pour résoudre le problème... :=)

Parce que franchement toutes les personnes qui viennent sur lieux trouvent absolument anormal que ce voisin ne mette pas de gouttières sous son toit ! Ce n'est quand même pas parce que l'on a acquis le droit de faire qq chose de stupide et de dommageable qu'il faut continuer ! Mon voisin n'a t-il pas aussi quelques devoirs, comme celui de se comporter en "bon père de famille" ?

Il doit bien y avoir une solution !

Bonne soirée

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher monsieur,

Citation :
Est ce que je peux argumenter que la non récupération des eaux crée un trouble anormal de voisinage (ce qui n'était pas le cas bien sur quand le fonds était en ruine et inhabité): humidité, esthétique, chute de pierres, bruit, pollution, etc...


Vous pouvez essayer mais le trouble anormal de voisinage n'est pas pris en compte lorsque l'existence du trouble (le déversement des eaux) est antérieur à la construction. D'autant, que l'existence d'un trouble anormal de voisinage suppose tout de même l'existence d'une faute, ce qui n'est pas le cas puisque ici, votre voisin dispose expressément du droit de déverser ses eaux de pluie sur votre terrain.


Citation :

Parce que franchement toutes les personnes qui viennent sur lieux trouvent absolument anormal que ce voisin ne mette pas de gouttières sous son toit ! Ce n'est quand même pas parce que l'on a acquis le droit de faire qq chose de stupide et de dommageable qu'il faut continuer ! Mon voisin n'a t-il pas aussi quelques devoirs, comme celui de se comporter en "bon père de famille" ?


La servitude est ici légale, ce n'est pas une servitude en "bon père de famille", en conséquence, la notion de bonne foi n'est pas prise en compte. En matière de propriété, le Code civil est extrêmement dur, validé en tout cela par la jurisprudence.

Il y a par exemple un cas qui m'a toujours choqué. C'était l'histoire d'une maison qui avait été construite avec un petit empiètement (8 cm me semble t-il) sur le terrain du voisin. Le voisin a réussi à obtenir la démolition de l'intégralité de la maison au motif de l'empiètement. Tout ça pour 8 cm..

Bref, tout ça pour souligner le caractère légaliste de la chose qui rend par définition même, son application concrète inique.


Mais bon, ce n'est qu'un avis! Vous devriez prendre un deuxième avis, sait-on jamais.


Très cordialement.

Posté le Le 11/10/2014 à 05:25
Cher Monsieur

Merci pour vos explications

Il ne me reste plus qu'a espérer que le service Protection Juridique de mon assurance trouve un autre angle d'attaque...

Très cordialement

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