Article CPC 700 : "Perdre son procès" = ?

> Justice

Posté le Le 21/03/2024 à 20:51
Bonsoir,

L'article 700 du CPC commande au juge de condamner "la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer" une somme d'argent à l'autre partie.

Ma première question est simple : quelles conditions permettent d'établir qu'une partie "perd son procès" ? Ce n'est pas clair du tout pour moi. Un demandeur a plusieurs prétentions, mais peut se faire débouter sur une, plusieurs, ou toutes. Que faut-il donc pour que le juge décide qu'il soit partie perdante ? Le débouté sur une ? Toutes ? Certaines ? Une majorité ?

Ma deuxième question me concerne directement. J'ai été débouté en première instance sur mes 4 demandes, et condamné à payer à la partie adverse ce qu'elle demandait au visa du CPC 700. Or, selon les avis indépendants de deux avocats, 3 d'entre elles étaient parfaitement fondées, mais pas la 4ème. Je me pose donc la question de l'opportunité d'interjeter appel ou pas.

A supposer que je me lance en appel, en convenant devant la cour que j'abandonne ma 4ème demande, mais demande la réforme des 3 autres, et que j'obtienne gain de cause sur ces 3 :
- suis-je fondé à demander au juge de constater que je n'aurais pas du être déclaré partie perdante en première instance, et demander le remboursement de ce que j'ai versé à mes adversaires, puisqu'ils n'auraient rien du toucher ?
- suis-je aussi fondé à demander le remboursement de mes frais d'avocat pour la procédure d'appel elle-même, ou est-ce que le fait que je reconnaisse qu'une demande était mal fondée m'en prive ?

De prime abord, il me semble si la justice est juste, elle doit me replacer dans l'état où j'aurais du me trouver à l'issue du procès de première instance. C'est à dire a minima rien à payer à mes adversaires, et peut-être une somme d'argent à recevoir. Que je doive faire appel pour y arriver par incompétence du premier juge ne m'est pas imputable - je précise que les moyens que je vais présenter sont exactement les mêmes, le premier juge ne les a même pas examinés, l'un des avocats qui a lu le jugement m'a confié qu'il n'avait jamais vu ça, l'autre a parlé de "travail de sagouin".

Merci d'avance de vos éclaircissements.

Poser une question Ajouter un message - répondre
Posté le Le 21/03/2024 à 21:11
Bonjour,

La décision de la cour d’appel se substitue au jugement de première instance ce qui rend vos questions sans objet.

Posté le Le 21/03/2024 à 22:24
Bonsoir,

Merci, mais je ne vois pas en quoi la substitution par une cour d'appel rend ma première question sans objet, puisqu'elle vaut pour toutes les juridictions. Donc, je réitère : quelles sont les conditions pour qu'un juge déclare qu'une partie "perd son procès" (quelle que soit la juridiction) ?

Pour ma deuxième question, si la cour d'appel se substitue au premier jugement, et que j'ai exécuté ce à quoi elle me condamnait, çàd payé la somme voulue au visa du CPC 700, il va bien falloir qu'elle dise si ou non cette condamnation est confirmée ou infirmée, et ordonner le remboursement, faute de quoi les erreurs du premier jugement ne seront pas réparées. Donc ma question de savoir si ou non cette condamnation est réexaminée ou au contraire éludée me semble encore pertinente.

Posté le Le 22/03/2024 à 07:52
Celui qui perd son procès est celui qui est condamné aux dépens. C’est précisé dans le jugement ou l’arrêt.

Si le premier jugement a été exécuté, il faut y substituer l’arrêt de la cour d’appel comme si le premier jugement n’avait jamais été émis. Cela peut impliquer une obligation de remboursement.

Posté le Le 22/03/2024 à 16:41
Citation :
Celui qui perd son procès est celui qui est condamné aux dépens.


Pour moi, c'est l'inverse: "La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie." (CPC 696)

Autrement dit, si vous perdez, alors vous êtes condamné aux dépens.

Par ailleurs, le CPC 700 débute par "Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer"

J'en reviens donc invariablement à la même question : sur quels critères, ou base légale de quels textes, un juge doit-il décider qu'une partie perd son procès?

Ces deux articles sont clairs comme du jus de chique.

Posté le Le 22/03/2024 à 17:51
Citation :
sur quels critères, ou base légale de quels textes, un juge doit-il décider qu'une partie perd son procès?

Il n'y a ni texte ni base légale. C'est laissé à l'appréciation du juge.

Posté le Le 22/03/2024 à 18:36
bonjour
Citation :
sur quels critères, ou base légale de quels textes, un juge doit-il décider qu'une partie perd son procès?
Je rejoins la réponse de Nihilscio
En résumé, le juge prend sa décision en fonction des éléments fournis par le demandeur, vous même ou votre avocat, et les éléments fournis par le défenseur, sur le conseil probable de son avocat (ou représenté à l'audience par celui-ci) en toute neutralité

En matière civile, la représentation par un avocat est obligatoire devant la cour d’appel, sauf exceptions pour des litiges relatifs à une mesure d’accompagnement judiciaire, au surendettement, à une demande de délégation d’autorité parentale, ou pour les affaires relevant du tribunal paritaire des baux ruraux ou du pôle social

Avant de vous lancer en appel prenez conseil

Si vous gagnez en appel votre adversaire devra vous rembourser l'art 700 vous condamnant en 1ère instance et vous pourrez obtenir une indemnisation sur ce même article

__________________________
Modérateur

Posté le Le 23/03/2024 à 18:00
Bonjour,

Merci pour vos réponses. Cela dit, chaber, vous me surprenez:

Si vous gagnez en appel votre adversaire devra vous rembourser l'art 700 vous condamnant en 1ère instance et vous pourrez obtenir une indemnisation sur ce même article

Je suis surpris, car j'ai commencé à disséquer un premier (mais petit) échantillon d'arrêts sur legifrance pour me faire ma propre opinion sur la question. Et je ne vois jamais aucune cour d'appel revenir explicitement sur l'article 700 de première instance. Je les vois condamner en appel sur cet article, mais pour des montants qui ne peuvent couvrir que les frais irrépétibles d'appel.

Je me demande toutefois quels les effets de la réforme Belloubet de 2019 sur ce problème, puisque si j'ai bien compris, auparavant les jugements n'avaient pas l'exécution provisoire, et l'appel en suspendait l'exécution. Donc en toute logique, un appelant n'avait à régler le CPC 700 de première instance qu'au terme d'un jugement d'appel qui lui aurait été à nouveau défavorable. Les choses étaient claires.

Aujourd'hui, faut-il qu'un appelant conclue par un dispositif de la forme:

- dire que X. n'était pas partie perdante au terme du jugement de première du jj/mm/aaaa
- en conséquence, infirmer la condamnation de X. à payer à Y. la somme de x€, et condamner Y. à payer à X. la somme de y€ au titre l'article 700 du CPC

pour obtenir gain de cause ?


Nihilscio affirme que Si le premier jugement a été exécuté, il faut y substituer l’arrêt de la cour d’appel comme si le premier jugement n’avait jamais été émis. Cela peut impliquer une obligation de remboursement.

Est-ce à dire que même si l'arrêt d'appel dit qu'il n'y pas lieu d'accorder d'article 700 (parce que les torts sont partagés, ou parce que la très obscure définition de "perdre son procès" ne permet pas de désigner un perdant), alors cela vaut jugement définitif, ce qui anéantit la première condamnation automatiquement et ouvre droit au remboursement sans qu'il doive être explicitement écrit?

Posté le Le 23/03/2024 à 20:25
L’appel a un effet dévolutif comme dit à l’article 561 du code de procédure civile. Ce n’est pas une innovation de Mme Belloubet. Il en est ainsi depuis des siècles. Quand les parties, l’appelant comme l’intimé, demandent en appel de condamner X à verser tant à Y, cela veut dire qu’elles demandent qu’en fin de compte tant soit versé par X à Y. Inutile de préciser que la décision prise en première instance doit être infirmée ou confirmée. Si des sommes ont été déjà versées en exécution provisoire du premier jugement, les parties en cause feront leur compte pour aboutir au résultat final qui seul est indiqué dans l’arrêt.

Si l'arrêt dit qu'il n'y pas lieu d'accorder d'indemnité au titre de l'article 700 et qu'une partie en a reçu une en exécution du premier jugement, elle doit rembourser.

Posté le Le 24/03/2024 à 09:21
Dans la réclamation de votre indemnisation votre avocat ajoutera les frais de l'art 700 que vous avez payés suite au jugement de 1ère instance et demandera une application de l'art 700 en votre faveur si vous avez gain de cause

__________________________
Modérateur

Posté le Le 24/03/2024 à 12:09
Merci à nouveau pour vos réponses, cela commence à devenir plus clair.
Chaber, je pensais comme vous depuis le départ : si la justice est juste, elle doit me replacer dans les conditions dans lesquelles j'aurais du me retrouver à l'issue du jugement de première instance. C'est-à-dire:
- au pire pas d'article 700 car pas de condamnation aux dépens (1 demande sur mes 4 n'était pas recevable, ce que je ne conteste plus vu le jugement, par contre les 3 autres sont absolument indiscutables)
- mais remboursement de mes frais nécessairement exposés en cause appel

Mais quelles sont mes chances que la cour d'appel statue ainsi ?

Je vais tenter d'évaluer mes chances, et un prendre un troisième avis. En attendant, merci encore à vous.

Posté le Le 24/03/2024 à 14:00
Citation :
Mais quelles sont mes chances que la cour d'appel statue ainsi ?

Nous ne sommes pas devins ni juges mais votre avocat pourrait émettre un avis s'il a tous les éléments

__________________________
Modérateur

Posté le Le 24/03/2024 à 17:38
Pour l'instant, ceux que j'ai consultés s'y sont refusé.
Nonobstant, je pense avoir une meilleure méthode. Sans être devin moi-même, je suis quand même informaticien, et statisticien, donc je préfère éplucher des arrêts qui se rapprochent de ma situation, regarder les décisions, et en déduire des probabilités. Sans que ce soit une garantie, puisqu'un juge fait ce qu'il veut, et que "perdre son procès" ne veut rien dire, puisque défini nulle part.

Posté le Le 24/03/2024 à 18:50
Citation :
bonjour

si le jugement vous a été signifié vous devez payer l'art 700 à votre adversaire et vous avez 1 mois pour faire appel

Citation :
Pour l'instant, ceux que j'ai consultés s'y sont refusé.

Ils sont honnêtes en estimant que votre dossier n'est pas assez étayé pour avoir une chance d'avoir un jugement d'appel favorable

__________________________
Modérateur

Posté le Le 24/03/2024 à 20:12
Citation :
Ils sont honnêtes en estimant que votre dossier n'est pas assez étayé pour avoir une chance d'avoir un jugement d'appel favorable


Alors là, je ne suis pas du tout d'accord. Le jugement viole ouvertement plusieurs articles de la loi de 1965 et de son décret d'application de 1967; il me fait dire ce que je n'ai jamais dit; il n'examine pas les moyens que j'ai soulevés et qui sont parfaitement légitimes pour obtenir gain de cause; et la juge soit ne s'est même pas relue, soit ne sait pas écrire français.

Ce n'est pas mon dossier qui ne serait pas suffisamment étayé qui les fait reculer, mais plutôt la décadence de la justice, qu'ils reconnaissent aussi.

Cela étant, ça ne date pas d'hier. J'ai cité un arrêt de cassation montrant que la violation de l'article 29 du décret avait déjà été jugé, et que la sanction était la nullité de la résolution. Je suis exactement dans le même cas. Et elle fait semblant de ne rien avoir vu.. peut-être pour me faire recommencer ?

Les plaignants ont eu le courage d'aller jusqu'au bout sur ce seul point, avec le parcours du combattant intégral - 1ère instance, appel, cassation, renvoi devant de la cour d'appel.
Le deuxième avocat que j'ai rencontré m'a confié que selon lui, la plupart des magistrats ne maîtrisent pas suffisamment le droit de la copropriété pour me suivre dans un raisonnement qui ne me paraît pourtant pas très compliqué, mais qu'il a qualifié de "fin".

Le risque ne vient pas de mon dossier, mais plutôt de la justice elle-même.

Ajouter un message - répondre

PAGE : [ 1 ]


pub devis