Droit de succession enfants non commun avec testament

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Posté le Le 27/04/2024 à 11:21
Bonjour,

Je sollicite votre aide dans le cadre d'une succession actuellement en cours.

Contexte : Mon père (le défunt) était marié à une femme (belle-mère). Ils étaient séparés depuis 2 ans (sans cadre légal, ils vivaient chacun de leur côté). Chacun avait 2 enfants respectifs et non communs : mon père avait 2 enfants, elle avait 2 enfants. Ils avaient acheté une maison ensemble. Mon père était propriétaire à hauteur de 2/3 et ma belle-mère à hauteur de 1/3.

Pour protéger les enfants respectifs, les deux avaient écrit un testament identique, dont voici des extraits :

Citation :
« Je supprime le quart en pleine propriété des biens attribués au conjoint survivant par l'article 757 du Code Civil qui reviendrait à mon épouse »
« Et je lui lègue l'usufruit gratuit et viager de l'ensemble des biens meubles et immeubles qui composeront ma succession ainsi que la pleine propriété de l'ensemble de mes liquidités »
« Elle jouira à vie de cet usufruit à compter de mon décès ».


Ce testament avait été écrit dans le but d'attribuer les biens de chaque parent aux enfants respectifs en cas de décès. C'était la compréhension qu'ils en avaient.

Sauf que nous sommes passés devant le notaire. Le notaire nous explique que puisque notre belle-mère est âgée entre 51 et 60 ans, la valeur de son usufruit est de 50%.

Dans le cas de la maison :
- 2/3 reviennent en nue-propriété aux 2 enfants du défunt, et 1/3 à sa femme.
- Mais comme elle a l'usufruit des biens, les 2/3 de la part du défunt sont à nouveau séparés à 50% pour la femme et 50% pour les 2 enfants.

Il en va de même pour tous les biens du défunt (voiture, etc.) :
- 50% pour la femme,
- 50% pour les 2 enfants.


Nous avons tous été surpris de cette répartition, puisque l'idée de base est que les biens du défunt reviennent intégralement aux enfants du défunt, mais que la part investie par le conjoint dans la maison lui revienne.


Questions :

- Est-ce que cette compréhension de la répartition est bien la bonne ?
- Existe-t-il un moyen de faire une succession telle qu'il avait été souhaité à la base, c'est-à-dire une pleine propriété des biens du défunt aux enfants, et le conjoint récupère sa part ?
- Est-il possible pour la femme de renoncer à l'usufruit des biens ?


Je précise que les 2 enfants et la belle-mere sont en accord pour changer la répartition. Ils souhaiteraient, par exemple, une succession en 1/3 pour les 3 membres à parts égales. Est-ce possible ?


Merci de votre aide.

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Posté le Le 27/04/2024 à 11:44
Bonjour.

Citation :
2/3 reviennent en nue-propriété aux 2 enfants du défunt, et 1/3 à sa femme.

Le 1/3 ne "revient" pas à sa veuve. Elle en est déjà propriétaire, puisque le bien a été acquis 2/3 pour votre père et 1/3 pour son épouse. Elle n'hérite pas de ce 1/3.

Ce qui dépend de la succession de votre père, ce sont les 2/3 du bien.
Et donc la veuve, en vertu du testament, n'a pas de droits en propriété sur ces 2/3, et recueille l'usufruit de ces 2/3 du bien. Vous héritez donc de la propriété de ces 2/3, mais cette propriété est nue, elle est grevée d'usufruit.

Le bien de votre père (ses 2/3 indivis) sont donc bien attribués seulement à ses 2 enfants.

Citation :
Mais comme elle a l'usufruit des biens, les 2/3 de la part du défunt sont à nouveau séparés à 50% pour la femme et 50% pour les 2 enfants.

Il ne s'agit pas d'une séparation en deux parties (au sens "les 2/3 divisés en 1/3 pour elle et 1/3 pour les enfants").

Vous avez bien les 2/3 du bien. Mais la valeur de ces 2/3 est actuellement de la moitié de ce qu'elle serait sans l'usufruit. Dans 30 ans, elle sera par exemple de 80% de ce qu'elle serait sans l'usufruit. Ce n'est donc pas une véritable répartition, mais une valorisation des droits, évolutive avec le temps : à son décès, vous serez pleins propriétaires des 2/3, l'usufruit s'éteint (une vraie répartition n'évolue pas dans le temps).

Elle peut renoncer à l'usufruit sur le bien en cantonnant son usufruit sur d'autres biens.
Dans ce cas, vous êtes en indivision 2/3 - 1/3 sur la pleine propriété sur le bien.
Elle pourrait même renoncer à sa vocation successorale d'usufruitière. Cela ne devrait pas remettre en cause la révocation testamentaire des droits légaux en propriété.

Posté le Le 27/04/2024 à 15:19
Merci Rambotte pour ta (double) réponse. C'est très clair et je remarque mes erreurs de langage sur les biens compris dans la succession (uniquement les 2/3).

Donc, il y a possibilité pour elle de renoncer à une partie ou à la totalité de son usufruit, ce qui pourrait répondre à notre besoin.

Par curiosité, est-ce qu'il y avait une possibilité pour eux, lors de la rédaction de leur testament, d'éviter cette situation (donc éviter les problématiques liées à l'usufruit ?). Auraient-ils dû écrire qu'ils suppriment respectivement l'usufruit de l'autre dans leur testament ?

Posté le Le 27/04/2024 à 15:49
En absence de testament, comme chacun a des enfants d'une autre union, la loi ne prévoyait pas d'usufruit par défaut. Les droits du conjoint survivant selon la loi sont seulement d'un quart en propriété de la succession dans votre contexte. Elle aurait hérité en propriété de 1/4 des 2/3 du bien immobilier, sans usufruit possible.

Le testament a voulu supprimer cet héritage en propriété prévu par défaut par la loi. Le testament aurait pu se contenter de supprimer cet héritage (exclusion totale du conjoint dans la succession), mais en plus, il a légué l'usufruit, en quelque sorte en remplacement (usufruit qui aurait été prévu par défaut par la loi dans un contexte où tous les enfants sont communs au couple).

Posté le Le 27/04/2024 à 16:02
Explication très claire. On se rend compte de la complexité qu'après coup.
Merci pour toutes tes explications !

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