Extradition et contraintes fiscales et principe de la spécialité

> Fiscalité > Particulier

Posté le Le 04/03/2012 à 03:26
Suite à notre correspondance, effectivement les poursuites fiscales échappent au principe de la spécialité; les avis sont unanimes
j'ai pris contact avec l'Institut de droit comparé de Lausanne avec lequel j'ai un R/V: ils mes donnent quelque espoir dans la mesure ou la date de l'extradition est antérieure aux accords bi latéraux, mais ils considèrent que ce type de poursuites relèvent, en France,sur le fond, de procédures d'exception qu'ils ne maitrisent pas complètement.
Pour préparer le R/V, il m'est demandé :
- sur quelle argumentation repose en France cette exclusion
- le commandement de payer (et son ADT)n'est-il pas, en droit français une contrainte administrative en tant que tel,
- peux t on centrer l'argumentation sur le principe de la spécialité en tant que principe de droit général dont tout*intimé* peut se prévaloir ( il existerait pour les marques, les brevets,les soumissions de marché , et ne serait pas limité au pénal, donc l'extradé comme tout à chacun pourrait se prévaloir du principe général de la spécialité)
Merci de me donner votre avis sur ces 3 points !

Avec mes salutations

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Posté le Le 04/03/2012 à 03:26
Bonjour monsieur,
Citation :

sur quelle argumentation repose en France cette exclusion


L'argumentation repose tout d'abord sur un fondement textuel, depuis largement repris par la jurisprudence de la Cour de cassation.

Les différents accords relatifs à l'extradition disposent expréssement que le principe de spécialité interdit de prononcer toute condamnation pour des faits antérieurs à ceux qui sont visés par l'extradition.

L'extradition étant uniquement possible pour des infractions pénales, si on interprète le texte au regard de l'intention du législateur, par "condamnation", ce dernier ne visait que les condamnations pénales.


Cette interprétation est confortée par la jurisprudence qui a considéré que: "En vertu du principe de spécialité, l'individu livré ne peut être poursuivi ou jugé contradictoirement pour aucune infraction autre que celle ayant motivé l' extradition. ● Crim. 12 juill. 1994: Bull. crim. no 277"


Qui plus est, l'extradition est soumis à des conditions quant au quantum de la peine encourue. Ainsi par exemple, la france refuse l'extradition lorsque l'extradé encourt la peine de mort dans son pays d'origine.

Le respect du principe de spécialité permet ainsi d'éviter de détourner ces quantums. Par ailleurs, le fait que ces textes parlent d'une peine et non d'une sanction, suffit à renforcer l'idée que le principe de spécialité ne s'applique que pour des infractions pénales puisque par définition même, une peine ne peut être prononcée que par une juridiction pénale de jugement.

Ainsi par exemple: article 2-1 de la convention européenne d' extradition: « Donneront lieu à extradition les faits punis par les lois de la partie requérante et de la partie requise d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'un maximum d'au moins deux ans ou d'une peine plus sévère. Lorsqu'une condamnation à une peine est intervenue, ou qu'une mesure de sûreté a été infligée sur le territoire de la partie requérante, la sanction prononcée devra être d'une durée d'au moins quatre mois » ;


Citation :

le commandement de payer (et son ADT)n'est-il pas, en droit français une contrainte administrative en tant que tel,


Si, je pense. Je ne sais pas vraiment ce que votre interlocuteur entend par "contrainte administrative" mais il est sûr que le commandement de payer et l'avis de redréssement sont des décisions faisant grief, susceptibles de recours pour éxcés de pouvoir devant le tribunal administratif.

Citation :
- peux t on centrer l'argumentation sur le principe de la spécialité en tant que principe de droit général dont tout*intimé* peut se prévaloir ( il existerait pour les marques, les brevets,les soumissions de marché , et ne serait pas limité au pénal, donc l'extradé comme tout à chacun pourrait se prévaloir du principe général de la spécialité)


Je en comprends pas trop ce que vous voulez dire par là. Le principe de spécialité existe effectivement dans toutes les branches du Droit mais a, dans ces autres branches, une toute autre signification.

Ainsi, en droit pénal de l'extradition, le principe de spécialité interdit de prononcer toute condamnation pour des faits antérieurs à ceux qui sont visés par l'extradition.

Dans les autres branches, le principe de spécialité signifie que l'on doit appliquer la loi spéciale au mépris de la loi générale: Spécalia generalibus derongant.



Le principe de spécialité tel qui vous intéresse ne s'applique qu'en Droit de l'extradition. A mon humble avis, si vous tenez à contester la décision de l'administration fiscale, il faudrait élaborer une argumentation du type:


-Le principe de spécialité exclut des condamnations autres que celles prévues dans l'acte d'extradition.

Un commandement de payer assorti d'un ATD peut être analysé comme une sanction faisant grief, ainsi prononcée à la suite d'un débat contradictoire.

Que la Cour européenne des droits de l'homme considère ce type de sanction comme relevant de la matière pénale, sur le fondement de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme.

Qu'en conséquence, un redréssement fiscal est une sanction qui peut être assimilé à une "condamnation" au sens ou l'entend le principe de spécialité.


Que par ailleurs, le principe de spécialité ne distinguant pas les condamnations pénales des autres condamnations, il n'y a pas lieu de distinguer, conformément à l'adage selon lequel: Ubi lex non distinguit nec nos distinguere abemus".



Bien cordialament.

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