Décès suite à une donation-partage
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Posté le Le 08/06/2025 à 19:55
Bonjour,
Suite au décès de notre mère, nous rencontrons un problème lié à une donation-partage effectuée quelques semaines plus tôt. Selon le notaire, celle-ci est considérée fictive sur le plan fiscal (nous n'avons toutefois reçu aucun courrier de l'administration). Nous avons payé des droits de succession sur la totalité du bien en question, comme si la donation n'avait pas eu lieu. Le notaire ne nous a pas informé de l'existence de cet article (751 CGI).
Cette donation-partage n'avait pas de lien direct avec le décès de notre mère. Je souhaiterais avoir des conseils sur la procédure à suivre pour contester cette présomption de fictivité. J'ignore par où commencer.

 

Posté le Le 09/06/2025 à 05:44
Bonjour.
Je crains qu'il n'y ait aucune voie de contestation de cette présomption fiscale irréfragable de propriété si la donation (peu importe qu'elle soit partage) a eu lieu 3 mois avant le décès.
Nous comprenons que c'était une donation-partage avec réserve d'usufruit au profit de la donatrice ?
Le 751 CGI dit entre autres que les biens donnés avec réserve d'usufruit sont réputés appartenir en pleine propriété à l'usufruitier. Il peut être apporté la preuve contraire, mais uniquement si la donation est faites plus de trois mois avant le décès.
Posté le Le 09/06/2025 à 07:15
Posté le Le 09/06/2025 à 07:49
Effectivement, mais il y a une bizarrerie dans l'arrêt de la cour de cassation, qui n'est donc pas certain de devoir faire jurisprudence. Le point positif est que l'administration fiscale accorde à l'arrêt une valeur générale dans sa documentation.
En effet, si on lit correctement le français de l'article 751, la preuve contraire n'est à rechercher que si la donation est plus vieille que 3 mois.
Les conditions d'application du "Ã moins que" sont que le donation soit :
- régulière,
- consentie plus de 3 mois avant le décès.
L'article 751 n'offre aucune preuve contraire pour les donations récentes de moins de 3 mois. On a l'impression que la cour de cassation a inventé une chose non prévue par le texte.
Posté le Le 09/06/2025 à 08:16
Personnellement je comprends le premier alinéa ainsi : présomption pour les donations désignées dans la première partie de la phrase (disons partie A) SAUF pour les cas désignés après le "à moins que" (disons partie B).
Présomption
Est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété, à l'un de ses présomptifs héritiers ou descendants d'eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées
Exceptions à la présomption
à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès ou qu'il y ait eu démembrement de propriété effectué à titre gratuit, réalisé plus de trois mois avant le décès, constaté par acte authentique et pour lequel la valeur de la nue-propriété a été déterminée selon le barème prévu à l'article 669.
Donc si on est dans le cas A, il y a une présomption que le donataire peut renverser en prouvant le contraire.
Mais si on est dans une des exceptions B, la présomption disparaît, la preuve apportée par le donataire n'est plus nécessaire.
C'est vrai que cette formulation est tordue.
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Modératrice
Posté le Le 09/06/2025 à 08:43
Si on simplifie (en retirant ce qui ne concerne pas le cas présent) la phrase pour mieux la comprendre :
Présomption :
Est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, tout bien appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété, aux héritiers
Exceptions :
(a) à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation ait été consentie plus de trois mois avant le décès
ou (b) [à moins] qu'il y ait eu démembrement de propriété, constaté par acte authentique, effectué à titre gratuit, [et] réalisé plus de trois mois avant le décès
Que ce soit (a) ou (b) l'exception décrite exige un délai supérieur à 3 mois.
Si on estime que pour les donations inférieures à trois mois, il y ait une exception de sincérité, il serait bon de l'inclure dans le texte du 751 CGI. Car ce n'est pas du tout écrit dans la lettre, ce n'est donc même pas une histoire d'interprétation de la lettre pour trouver l'esprit, la cour de cassation a purement et simplement ajouté quelque chose non prévu.
Posté le Le 09/06/2025 à 09:48
Comment interprétez vous le "jusqu'à preuve du contraire" ?
Pour moi il faut comprendre la phrase comme "jusqu'à preuve du contraire le bien donné fait partie de la succession de l'usufruitier sauf dans les cas bidule ou machin où cette présomption n'existe pas".
Ici on n'est pas dans le cas bidule ni dans le cas machin (donation faite plus de trois mois avant le décès.
Et donc jusqu'à preuve du contraire le bien est réputé faire partie de la succession de l'usufruitier.
On comprend que cet article a été créé pour éviter qu'une personne ne fasse une donation en nue-propriété sur son lit de mort afin de minimiser les frais de succession. L'intention principale ne serait en effet pas de gratifier le donataire en se dépouillant d'un bien, mais de contourner la loi par un abus de droit.
Mais pour éviter de léser les donataires de bonne foi, le législateur leur permet d'apporter la preuve que la donation n'était pas un acte fictif destiné à commettre un abus de droit.
Et la jurisprudence citée par le Bofip conclut que dans le cas qui lui est soumis les preuves ont été suffisantes pour renverser la présomption.
La donation datant de moins de trois mois avant le décès, elle était présumée fictive. Mais il y a eu "preuve du contraire".
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Modératrice
Posté le Le 09/06/2025 à 10:34
Oui, il s'agissait d'une transmission de nue-propriété.
Au jour de la donation, ma mère se portait bien. Et si nous avions été informés de cet article, la donation aurait eu lieu, cela ne change rien sur ce point. Toutefois, n'est-ce pas là un consentement partiellement éclairé ?
Son état de santé était incertain sur le long terme, mais stabilisé, et l'acte en lui-même n'était pas motivé par celui-ci. Il s'agissait d'un bien familial qu'elle souhaitait transmettre. Aussi, si la loi présume que l'acte n'était pas sincère, ne rien contester reviendrait à approuver cette réalité. Le dernier bilan médical était très positif. Toutefois, il s'est écoulé 4 mois entre cet examen et le décès, et j'ignore si cet élément peut avoir un poids. Ma mère avait 60 ans.
Le notaire doit-il intervenir dans cette contestation, ou sommes-nous seuls dans cette démarche ? Nous avons, il me semble, jusqu'au 31/12 pour formuler notre demande. J'ai eu un RDV au SPF, mais les personnes qui m'ont reçu n'étaient pas au fait de la présomption de fictivité et n'étaient pas en mesure de me renseigner. Le notaire est assez fermé sur la question.
Posté le Le 09/06/2025 à 10:55
Citation :
Comment interprétez vous le "jusqu'à preuve du contraire" ?
Je comprends votre point de vue. A la première lecture de l'article, pour moi, les "à moins que" étaient les descriptions concrètes des preuves contraires admissibles. Mais effectivement, la mention peut être lue comme de portée générale, quand on ne se trouve pas dans le contexte d'un des "à moins que".
Le SPF n'est que le service de la publicité foncière, donc en charge de la publication des actes portant mutation de propriété. Il n'est pas concerné par les questions de déclaration de succession, et ce n'est pas au SPF qu'on envoie ces déclarations (on y envoie les attestations immobilières après décès).
Posté le Le 09/06/2025 à 11:12
Bonjour,
Aussi, si la loi présume que l'acte n'était pas sincère, ne rien contester reviendrait à approuver cette réalité.
Dans la jurisprudence citée par le Bofip (qui définit la position officielle de l'Administration), la preuve du caractère soudain et imprévisible du décès a été apporté par :
- un certificat du médecin traitant
- deux attestations de témoins certifiant avoir vu la défunte en bonne santé.
J'ai eu un RDV au SPF, mais les personnes qui m'ont reçu n'étaient pas au fait de la présomption de fictivité et n'étaient pas en mesure de me renseigner.
Le SPF ne sera pas compétent dans ce domaine, car on ne parle pas de propriété foncière mais de taxation de la succession.
Ce que je vous conseille est de réunir des preuves du caractère soudain et imprévisible du décès de votre mère, donc tout élément montrant qu'il n'y avait pas de raison de croire qu'elle risquait de décéder au jour de la donation.
Il va vous falloir au moins un certificat de son médecin, idéalement des éléments de son dossier médical. Un "bilan médical très positif" sera parfaitement recevable. Vous pouvez aussi faire rédiger des attestations par des personnes l'
ayant rencontrée peu de temps avant son décès qui [confirment] cet état et [témoignent] du caractère soudain et surprenant de celui-ci comme dit la Cour de cassation.
Ensuite vous pourrez faire une demande de rescrit fiscal :
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F13551
Il faudra détailler clairement votre situation. Vous joindrez toutes vos preuves du bon état de santé de votre mère. La question sera de savoir si au vu des éléments fournis le fisc considère que la présomption du 751 est renversée.
En cas de réponse négative, il faudra aviser. En cas de réponse positive, l'Administration sera engagée et vous pourrez aller l'agiter sous le nez du notaire.
C'est une démarche simple, gratuite et sans risque.
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Modératrice
Posté le Le 09/06/2025 à 20:50
Merci. Je vais suivre vos conseils.
À bientôt.
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