Préavis remis en main propre au bailleur valable?

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Posté le Le 01/04/2015 à 05:25
Bonsoir,

Suite à mésentente avec mon bailleur, je lui ai remis mon préavis en main propre de mon logement principal non meublé (loi 89) le 22 juillet avec une "clause" ou je m'engage à libérer les lieux si le bailleur a trouvé un nouveau locataire au 01 septembre.

Je me suis rétracté le lendemain mais le bailleur n'a rien voulu savoir!

Pourtant, d'après la Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 Article 15 Modifié par Loi 2002-73 2002-01-17 art. 223 JORF 18 janvier 2002, le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou signifié par acte d'huissier. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte d'huissier.
La cour de cassation l'a confirmé aussi (Cass. 3e civ., 3 avr. 2001)

Dans ce cas il me semble que mon congé est frappé d'une nullité absolue car rédigé sous seing privé qui est contraire à la loi d'ordre public de 89.
Ainsi que ma clause de libérer le logement au 01 septembre qui est aussi contraire a la loi d'ordre public de 89.

Mon bailleur ne l'entend pas de cette oreille et m'a donc fait parvenir par huissier une lettre de sommation de laisser visiter les lieux pour relouer (je refuse car je dénonce le congé), suivi d'un recommandé 3 jours plus tard me disant qu'il avait trouvé un nouveau locataire au 01 septembre (apparemment sans avoir visité les lieux) et que je devais quitter les lieux à cette date.

La lettre de l'huissier m'interpelle car il y a bien la mention préavis remis en main propre.

Ma question est donc: quelle est la validité de mon congé alors que l'huissier à l'air de confirmer ce congé ...? (le confirme t-il ou est ce un coup de bluff de l'huissier et du bailleur qui se connaissent, ou l'huissier n'a t-il fait que retransmettre la demande de son client sachant qu'il n'est pas valide ?)-

Cordialement

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Posté le Le 01/04/2015 à 05:25
Cher monsieur,

Citation :
Pourtant, d'après la Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 Article 15 Modifié par Loi 2002-73 2002-01-17 art. 223 JORF 18 janvier 2002, le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou signifié par acte d'huissier. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte d'huissier.
La cour de cassation l'a confirmé aussi (Cass. 3e civ., 3 avr. 2001)

Dans ce cas il me semble que mon congé est frappé d'une nullité absolue car rédigé sous seing privé qui est contraire à la loi d'ordre public de 89.
Ainsi que ma clause de libérer le logement au 01 septembre qui est aussi contraire a la loi d'ordre public de 89.


Parler de "nullité absolue" me semble bien excessif ici, il s'agit en réalité d'une nullité relative (pouvant être invoquée par les parties et non les tiers, et supposant en règle générale l'existence d'un grief).

Les formalités obligatoires applicables au bail d'habitation existent en ce qu'elles ont vocation à protéger une partie: Ainsi par exemple, vous devez en principe adresser votre préavis par lettre recommandée AR au bailleur dans le soucis de vous protéger, en évitant au bailleur la possibilité de contester en prétextant n'avoir jamais reçu le préavis.

Le problème ici, c'est que c'est vous qui demandez la nullité de cette règle censée vous protéger. Dans un cas similaire, la jurisprudence avait prévu que la nullité ne pouvait pas être demandée par le locataire sur ce motif. Il ne s'agissait que d'une jurisprudence d'un tribunal d'instance (donc pas de la Cour de cassation (TI clermont-ferrand 1995) mais cette solution n'étant guère critiquable, j'ai bien peur que votre congés soit tout à fait valable (en fait illégal mais vous ne pouvez pas l'invoquer).

S'agissant du fait que vous avez proposé vous même de partir au premier septembre, il s'agit certes d'un droit d'ordre public mais il est légal de renoncer à un droit lorsque celui-ci est acquis.

Ainsi, même si la loi prévoit que le locataire a droit à un préavis de trois mois, vous pouvez tout à fait y renoncer. C'est d'ailleurs ce que vous avez fait et qui n'est donc pas contestable ici.

Le bailleur a donc bien raison en réalité.

Très cordialement.

Posté le Le 01/04/2015 à 05:25
Monsieur,

Le TI révèle une mauvaise lecture de la loi de 89 et une mauvaise compréhension de la notion d'ordre public...

La loi de 1989 est d'ordre public, et nul ne peut y déroger, toute clause contraire est nulle et non écrite.

le préalable de la lettre recommandée AR est indispensable, il n'y a pas que le bailleur qui peut s'en prévaloir. le locataire peut se prévaloir facilement qu'un acte sous seing privé n'aurait pas date certaine, ou a été signé sous la contrainte. Un tel acte est nul d'une nullité absolue et non relative.

Le locataire, sans préavis envoyé en RAR, peut donc valablement dénier toute validité à un acte sous seing privé ; si le législateur a explicitement prévu que la loi de 89 est d'ordre public, c'est justement pour pallier et anticiper sur ce genre de contentieux.

la nullité absolue qui sanctionne la violation d'une règle d'ordre public peut être invoquée en l'absence de grief et/ou de préjudice. D'autre part, toute stipulation contractuelle est impuissante à écarter l'application d'une règle d'ordre public, puisqu'il s'agit d'un ordre public de protection expressément prévu par le législateur. La question ne se pose même pas de savoir si un acte sous seing privé peut recevoir application.

La loi impose que la notification du congé du congé soit faite par courrier recommandé ou signification par huissier. Toute autre forme est de nul effet. (La cour d'appel de Lyon, par un arrêt du 25/06/2002, Revue Loyers et Copropriétés 2003, n° 5, obs. de Mr. B; Vial-Pedroletti) en a ainsi jugé

Donc, un congé n'est valable que s'il est réceptionné en LRAR ou remis par huissier (article 15 de la Loi n°89-462 du 6 juillet 1989).

Mon congé est nul car il n'a pas été donné par LRAR ou acte d'huissier.

Je vais donc évoquer auprès de mon bailleur l'arrêt de la Cour de Cassation qui suit qui pose ce principe :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par l'association CILR, dont le siège est ... la Réunion,

en cassation d'un arrêt rendu le 12 février 1999 par la cour d'appel de Saint-Denis la Réunion (chambre civile), au profit de Mme Geneviève X..., demeurant ... des Noirs, résidence Saint-Raphaël, appt 6, 97400 Saint-Denis la Réunion,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 février 2001, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Dupertuys, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, conseiller doyen, M. Baechlin, avocat général, Mme Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Dupertuys, conseiller, les observations de Me Delvolvé, avocat de l'association CILR, de la SCP Bachellier et Potier de la Varde, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 15-I, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu que le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou signifié par acte d'huissier ; que le délai de préavis applicable au congé est de trois mois lorsqu'il émane du locataire et que ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte d'huissier ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis la Réunion, 12 février 1999), que l'Association comité interprofessionnel du logement de la Réunion (l'Association) a, par acte du 24 mars 1992, donné à bail un appartement à Mme X... ; que celle-ci a quitté les lieux le 1er juin 1995 après avoir donné congé, par lettre simple, pour le 1er août 1995 ; que la bailleresse a fait assigner Mme X... en paiement de loyers non réglés, de réparations locatives et de frais d'huissier ;

Attendu que, pour débouter l'Association de la demande de paiement des loyers au titre du préavis jusqu'en septembre 1995, l'arrêt retient que Mme X... a donné congé pour le 1er août 1995, que le congé part de la date de la lettre signifiant congé quant bien même elle ne serait pas recommandée, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elle a été reçue ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ;

Attendu que pour débouter l'Association de sa demande de paiement des travaux de remise en état des lieux, l'arrêt retient que celle-ci n'en chiffre pas le coût et que, dès lors la demande est irrecevable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'Association, qui réclamait la confirmation du jugement condamnant Mme X... au paiement d'une somme incluant le montant du coût des réparations locatives, avait joint à ses conclusions signifiées le 10 août 1998, une facture relative à l'exécution des travaux, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel Saint-Denis la Réunion, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à l'Association CILR la somme de 12 000 francs ou 1829,39 euros ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille un.

Cordialement.

Posté le Le 01/04/2015 à 05:25
Cher monsieur,

Citation :

Le TI révèle une mauvaise lecture de la loi de 89 et une mauvaise compréhension de la notion d'ordre public...


C'est pas mon avis mais enfin, je suis pas membre de la Cour de cassation juste enseignant à la faculté de Droit de Montpellier.
Citation :

La loi de 1989 est d'ordre public, et nul ne peut y déroger, toute clause contraire est nulle et non écrite.


je suis d'accord, c'est ce qu'on appelle un ordre public de protection.

Citation :
le préalable de la lettre recommandée AR est indispensable, il n'y a pas que le bailleur qui peut s'en prévaloir. le locataire peut se prévaloir facilement qu'un acte sous seing privé n'aurait pas date certaine, ou a été signé sous la contrainte. Un tel acte est nul d'une nullité absolue et non relative.


Je suis pas d'accord sur ce point: Le problème de la date certaine dans un courrier écrit de votre part, et dont la date n'est pas contestée par le bailleur, n'a aucune incidence. Quant au problème de la contrainte, il existe pour tous les contrats sous seing privé à l'exception de ceux faits devant notaire. Le problème est donc universel et ce n'est pas l'objet de la lettre recommandé que d'y subvenir.

Citation :

la nullité absolue qui sanctionne la violation d'une règle d'ordre public peut être invoquée en l'absence de grief et/ou de préjudice. D'autre part, toute stipulation contractuelle est impuissante à écarter l'application d'une règle d'ordre public, puisqu'il s'agit d'un ordre public de protection expressément prévu par le législateur. La question ne se pose même pas de savoir si un acte sous seing privé peut recevoir application.

La loi impose que la notification du congé du congé soit faite par courrier recommandé ou signification par huissier. Toute autre forme est de nul effet. (La cour d'appel de Lyon, par un arrêt du 25/06/2002, Revue Loyers et Copropriétés 2003, n° 5, obs. de Mr. B; Vial-Pedroletti) en a ainsi jugé


Vous défendez bien votre bout de pain: Les règles sont les bonnes et l'argumentation se tient. MAIS cela traduit une méconnaissance de ce qu'est l'ordre public en tant que notion. Je fais le pari (mais bien évidemment, je peux me tromper) que le tribunal va rejeter votre demande en nullité.

Citation :

Je vais donc évoquer auprès de mon bailleur l'arrêt de la Cour de Cassation qui suit qui pose ce principe :


Vous remarquerez que dans l'arrêt, c'est le bailleur qui demande la nullité du préavis, et non le locataire. Or, c'est bien ce point qui pose problème.

Que la loi de 1989 soit d'ordre public, on est tous d'accord. Que cette loi impose le recommandé, je suis là encore d'accord. Qu'en revanche, vous demandiez la nullité du préavis délivré par vous même, c'est sur ce point que je ne suis pas d'accord.

Bien évidemment, on peut en discuter. Bien évidemment, vous trouverez toujours des piètres juristes qui abonderont dans votre sens et vous donneront des jurisprudences qui "paraissent" vous donner raison. La réalité, c'est que les probabilités pour que vous perdiez sont importantes et qu'à mon sens, vous prenez beaucoup de risques à aller plaider sur une affaire comme celle-là.

Vous avez tous les éléments en mains, vous avez plus qu'un choix à faire. Mon travail si je puis dire, c'est de faire en sorte que vous ne partiez pas au "casse-pipe". Une chose est sûre, si vous décidez d'aller au tribunal, prenez bien conscience que le risque d'échec est important.


Très cordialement.




Très cordialement.

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