Bail commercial sur terrain agricole

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Posté le Le 31/01/2023 à 14:33
Bonjour à tous,

Ma situation: je suis monitrice équestre au chômage et je souhaite créer mon activité de retraite-pension pour équidés âgés. C'est une activité de gardiennage pur et simple.

On me propose un petit terrain agricole (moins de 1 Ha) en location pour démarrer cette modeste activité, or je n'ai aucun statut agricole et mon diplôme d'enseignante équestre (bpjeps) ne me permet pas d'avoir l'équivalence de la Capacité Professionnelle Agricole. On m'affirme aussi que la SAFER n'autorisera pas mon bail sur ce terrain et pourra même le réattribuer à un agriculteur déjà en activité !

QUESTION : Mon activité n'étant pas agricole car je ne ferai que du gardiennage d'équidés âgés, puis-faire un Bail Commercial sur ce terrain agricole ?

Que me conseillez-vous de faire pour créer mon activité de pension d'équidés âgés ?

Un grand merci pour vos réponses et conseils car je n'ai plus de solution.

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Posté le Le 31/01/2023 à 21:35
Bonjour,

Le bail commercial n’est pas de droit pour les terrains nus sans construction. C’est ce que dispose l’article L145-4 du code de commerce : ce régime s’applique aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité et, en outre, aux baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées - soit avant, soit après le bail - des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire.

La jurisprudence le confirme, notamment par cet arrêt du 10 septembre 2020, n°19-12.814 : les dispositions relatives au bail commercial s'appliquent aux baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire.

Vous ne pourriez donc prétendre bénéficier du régime des baux commerciaux que si une construction quelconque mais fixe et suffisamment solide pour être considérée véritablement comme une construction était ajoutée sur le terrain, soit par vous soit pas le propriétaire, et que cela soit expressément convenu dans le bail.

Cela dit, même si le régime des baux commerciaux ne s’applique pas obligatoirement selon les dispositions du code de commerce, il peut toujours être adopté conventionnellement par les parties au contrat. C’est éventuellement à négocier. Mais ce n’est peut-être pas dans votre intention ni dans celle du propriétaire. Ce dernier n’est peut-être pas disposé à s’engager dans un bail de neuf ans avec droit au renouvellement ou indemnité d’éviction.

La rédaction du bail est libre. Les clauses principales porteraient a minima sur la durée, les modalités d’une reconduction, qui peut être tacite ou expresse, la résiliation, le loyer et la révision du loyer. Le bail peut aussi être à durée indéterminée. En ce cas, il est résiliable à tout moment par l’une des parties avec un délai de préavis à convenir.

Je ne suis pas certain que la SAFER puisse s’opposer à la location envisagée. Les dispositions de code rural relatives aux baux ruraux ne s’appliquent qu’à des terrains agricoles d’une surface supérieure à un plafond défini par arrêté préfectoral. Vous pourriez vous renseigner auprès de la SAFER ou de la chambre d’agriculture.

Il faudrait aussi vérifier auprès de la mairie que l’activité de pension pour chevaux, qui n’est pas agricole, est autorisée dans la zone où se situe le terrain. Elle devrait l'être, mais sait-on jamais.

Si l'on vous répondait, à la mairie, la SAFER, la chambre d'agriculture ou ailleurs, que vous l'activité envisagée n'est pas autorisée, il faudrait en demander le motif juridique exact, pour le cas où l'on vous raconterait n'importe quoi. Cela peut arriver.

Ce qui est sûr est que, votre activité n’étant pas agricole, elle sera commerciale et vous devrez vous inscrire au registre du commerce et des sociétés.

Posté le Le 01/02/2023 à 13:14
Bonjour et merci pour votre réponse et les renseignements que vous m'avez donnés.

Je constate que le droit est complexe est donne lieu à de nombreuses interprétations car aux mêmes questions concernant mon projet, les réponses ne sont pas les mêmes selon qu'elles proviennent de forums juridiques, de conseillers spécialisés ou des différentes administrations et organismes concernées (mairie, chambre agri, safer, le Champ, DDT, Conf.paysane, etc).

Il faut vraiment que je m'y fasse et que j'arrive à faire la part des choses. Je comprends aussi que selon les régions, la même réglementation n’est pas interprétée de la même façon et s’applique de façon complètement différente...

Ceci dit, je note dans votre réponse détaillée plusieurs informations qui apportent de l'eau à mon moulin :

1°) "Vous ne pourriez donc prétendre bénéficier du régime des baux commerciaux que si une construction quelconque mais fixe et suffisamment solide ...".

Ouf ! c'est la cas car il y a non seulement un tout petit cabanon construit en pierres (environ 4 à 5 m²), très ancien, probablement une cabane de berger qui me sera très utile pour ranger des outils, matériels équestres et produits de soins équins. Mais il y a aussi un vieux puits que j'espère remettre en état pour avoir de l'eau. A ces constructions, j'envisage de rajouter quelques aménagements : petit abri à fourrages et abris légers pour que les chevaux âgés puissent s'abriter de la pluie, du soleil ou de la neige.
Ces constructions légères se feront bien évidemment avec l'accord de la mairie et du propriétaire.

Cela répond-il à la condition que vous citée ("construction quelconque mais fixe et suffisamment solide") pour justifier un bail commercial ?

2°) "Le bail peut aussi être à durée indéterminée. En ce cas, il est résiliable à tout moment par l’une des parties avec un délai de préavis à convenir".

Je peux proposer au bailleur de signer un Bail Commercial à Durée Indéterminée avec une clause de résiliation d'un an pour le rassurer (et ses enfants) et lui permettre de récupérer son bien, et pour moi d'avoir le temps de retrouver un autre site pour déplacer mon activité.

Il est certain que je prends un gros risque, mais je mise sur une relation de confiance avec le propriétaire de ce terrain (un monsieur âgé de 84 ans qui a toute sa tête) et qui est plutôt content de savoir que son terrain dont il ne fait rien depuis de nombreuses années va servir pour accueillir de vieux équidés en retraite.

3°) "Je ne suis pas certain que la SAFER puisse s’opposer à la location envisagée".
Difficile de vous répondre mais unanimement les agriculteurs locaux et les autres (notaire, Adear, ...) affirment que compte-tenu de la pression foncière sur cette commune, la SAFER préempte la moindre surface de terre agricole !

C'est pénible de tomber sur tous ces obstacles juridiques et administratifs alors que je fais tout ce que je peux pour me sortir de ma situation de chômage avec une activité qui me plait, pour laquelle j’ai les compétences et un diplôme et qui répond à un besoin local !

4°) "Vous pourriez vous renseigner auprès de la SAFER ou de la chambre d’agriculture".
Difficile d'avoir des renseignements rapides et compréhensibles auprès de ces administrations difficiles à contacter. J'attends encore leur réponse à ma demande écrite. (ca va plus vite sur les forums juridiques !).
En plus, les conseillers me disent d'être prudente car si je demande des conseils à la SAFER, elle peut dans la foulée surveiller les transactions sur le bien que j'ai trouvé par mes propres prospections et le préempter dès qu'un acte sera signé... Ce serait la double peine !

D'ailleurs une nouvelle loi (décret "Sempastous": https://www.vie-publique.fr/loi/280062-loi-mesures-durgence-acces-au-foncier-agricole) donnerait encore plus de pouvoir à la SAFER pour interférer dans les transactions, même sur les baux !

Je comprends bien que le but de ce durcissement de la loi est de protéger l'accès aux terres agricoles pour les paysans, malheureusement mon activité n'étant pas "que agricole", je ne suis jamais prioritaire. Pourtant, je suis bien obligée de m'installer sur un terrain agricole car on ne met pas des équidés en ville, et qui plus est j'achète des productions agricoles pour mes équidés (fourrages : paille, foin, luzerne, sainfoin, céréales : orge, maïs, avoine,… , fruits, légumes, etc). En plus je produirai du fumier de cheval qui intéressera de petits agriculteurs locaux.

Les activités équestres ne sont pas bien vues par le monde agricole : elles sont "à cheval", c'est le cas de le dire, sur l'agricole, le service et le commerce, et elles ont l’image « d’un sport de riches » (et d’un « métier de pauvres »), c’était en partie vrai et ça l'est encore dans certaines régions !

5°) « Ce qui est sûr est que, votre activité n’étant pas agricole, elle sera commerciale et vous devrez vous inscrire au registre du commerce et des sociétés ».

Cette remarque est plus complexe qu’elle n’y parait !
Les apiculteurs ont mis longtemps avant d’être reconnus « agriculteurs » à part entière. En revanche, les chenils et élevages canins sont rattachés au secteur agricole !!! (ce sont encore les subtilités du Droit français).

Ceci dit, d’une part le rattachement au secteur agricole de mon activité de retraite de chevaux n’est pas forcément judicieux mais pourrait se faire au regard de nombreux critères (fumier, achat de productions agricoles, etc), mais d’autre part ce rattachement est un piège car il ne donne aucune priorité à l’accès au foncier agricole : je suis enregistrée comme porteuse de projet sur le site de la SAFER et je candidate sur des annonces qui me conviennent, mais je ne suis jamais retenue lors des commissions d'attributions !!!
Donc, la SAFER, j’essaye plutôt de m’en éloignée pour pouvoir enfin travailler… C’est kafkaïen !

…ceci dit, j’avance, péniblement et lentement, mais surement !

Posté le Le 01/02/2023 à 22:47
Votre projet est de louer un terrain à vocation agricole de petite surface. Vous ne parlez pas d’acheter.
La loi du 23 décembre 2021 ne vous concerne pas : vous ne prenez pas de parts dans une société propriétaire de terrains agricoles.
La SAFER a un droit de préemption lors de la vente d’un terrain agricole. Cela ne vous concerne pas puisque vous n’envisagez pas d’acheter le terrain.
Il n’y a pas à demander l’autorisation de la SAFER pour louer. Si le terrain est libre d’occupation, son propriétaire peut le donner en location sans restriction. Si la SAFER intervient dans une location, c’est comme intermédiaire. Dans ce cas il est naturel qu’elle donne la préférence à un agriculteur.

Il y aurait peut-être lieu d’étudier la question du statut de votre activité ainsi que celui de votre régime social. En principe une pension pour chevaux n’est pas une activité agricole mais peut en devenir une si elle inclut d’autres prestations comme le dressage. Peut être la production de fourrage ou de fumier ? Ce serait à étudier avec l’aide d’une association agissant dans le domaine équin.

Si votre activité est agricole, le principal intérêt en serait que vous pourriez édifier les constructions nécessaires à votre exploitation. Car en zone agricole, les terrains sont en principe inconstructibles sauf pour les besoins d’une exploitation agricole. Si votre activité est commerciale, cela pourrait poser problème. Il faudrait savoir quelles sont les règles d’urbanisme sur la zone où est situé le terrain : voir le PLU.

Si l’activité est agricole, le bail serait un bail rural, mais dérogatoire au statut en raison de la petite surface du terrain, à vérifier à la lecture de l’arrêté préfectoral.

Si l’activité est commerciale, le bail n’est soumis au statut des baux commerciaux qu’en raison des constructions exploitées dans le cadre de l’activité. Un bail commercial à durée indéterminée n’existe pas. Un bail commercial se caractérise essentiellement par :
- une durée qui ne peut être inférieure à neuf ans,
- un droit du locataire au renouvellement du bail ou, à défaut de renouvellement, à une indemnité d’éviction,
- des modalités de révision du loyer très encadrées.
Le propriétaire hésitera peut-être à s’engager dans un bail qui sera très contraignant pour lui.
Si le bail n’est pas soumis au statut des baux commerciaux, les clauses sont négociées quasiment librement par les parties.

Posté le Le 02/02/2023 à 13:22
Bonjour et merci pour vos réponses qui m'amènent à vous donner quelques précisions :

Votre projet est de louer un terrain à vocation agricole de petite surface. Vous ne parlez pas d’acheter.
La loi du 23 décembre 2021 ne vous concerne pas ...


C'est justement de là que part tout le problème!
J'ai un projet professionnel, je prospecte et trouve un terrain en friche qui me convient, je contacte le propriétaire qui accepte de me vendre son terrain pour créer l'activité que je lui présente et nous nous mettons d'accord sur un prix.
Puis le notaire m'alerte que compte tenu de son expérience des dossiers similaires sur la commune (cessions terrains agricoles), il y a 99% de chance que la SAFER préempte la vente.

Donc, je cherche une solution pour pouvoir tout simplement créer mon activité pour sortir du chômage grâce à mon expérience équestre et sachant que l'achat d'un terrain agricole semble impossible pour moi à cause de la SAFER. De plus, un bail agricole ne peut-être signé que si mon activité est reconnue agricole (ce qui encore une autre paire de manche car un équidé, c'est bien connu, ça ne vit pas dans un champ agricole mais en appartement ou se stocke dans un garage!...), et que si j'obtiens aussi une autorisation d'exploiter qui ne sera donné que si j'ai une "Capacité Professionnelle Agricole", or mon diplôme d'état (bpjeps équestre) n'est pas reconnu agricole alors qu'il intègre des UC d'élevage équin.

Si je ne réponds pas à toutes ces conditions, je ne peux pas démarrer mon activité et pire, le bail peut être réattribué par la SAFER à un exploitant agricole (un "vrai" !) qui va prendre ma place. Tout cela est kafkaïen !

Le vendeur est âgé (84 ans), nous échangeons de façon très cordiale et il est content de savoir que son terrain va servir pour un projet de pensions pour équidés âgés. Je serais très déçue si tout capotait et que la SAFER récupérait le terrain de ce monsieur pour y installer une activité agricole qu'il ne souhaitait pas.

Quand je demande des conseils aux structures compétentes, elles me répondent qu'elles ne sont pas là pour conseiller sur comment "truander" la SAFER, mais ce n'est pas le cas, et cette réponse est humiliante.

Il y aurait peut-être lieu d’étudier la question du statut de votre activité ainsi que celui de votre régime social. En principe une pension pour chevaux n’est pas une activité agricole mais peut en devenir une si elle inclut d’autres prestations comme le dressage. Peut être la production de fourrage ou de fumier ? Ce serait à étudier avec l’aide d’une association agissant dans le domaine équin.

Je me suis posée toutes ces questions mais elles n'apportent pas de solution et complique encore les démarches administratives. En fait, je peux vous retourner la réponse qui m'est faite de tenter de truander la SAFER en présentant mon activité pour la faire rentrer faussement dans les cases de la SAFER.
J'ai un projet précis et avec l'aide d'associations d'aide à l'installation agricole j'ai fait un prévisionnel, un business-plan et tout ce qu'il faut... mais ça ne sert à rien car chaque fois que je candidate sur une offre SAFER je ne suis pas retenue.

Il ne faut pas s'étonner que les citoyens cherchent des parades "douteuses" voire même illégales pour avancer dans leur projet de vie quand il se retrouve dans un dialogue de sourd avec une administration aussi à l'écoute qu'un mur en béton.

On me propose aussi de me donner les coordonnées "d'un ami d'un ami" qui travaille à la SAFER pour qu'il puisse intervenir pour me permettre d'accéder à ce terrain .... et voilà, ça y est, la boucle est bouclée et il faut utiliser le "copinage" pour arriver à avancer !...

Finalement, rester au chômage c'est plus reposant et complètement légal !

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