Jugement prudhommal

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Posté le Le 29/03/2025 à 07:21
Bonjour.

Exposition de mon cas et questions relatives.

Je suis passé au conseil de prudhomme en septembre.
J'ai eu gain de cause sur l'ensemble des demandes.
Entre autre résultat figure l'obligation de fournir des documents sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de deux mois après notification du jugement.

Mon ancien employeur a dans un premier temps fait appel des décisions puis c'est acquitté de 80% du montant de l'exécution provisoire.

Mes question sont les suivantes.

Cet appel et ce paiement partiel ont t-ils une incidence sur les intérêts légaux qui court depuis la date du jugement pour les sommes salariales et depuis la notification pour les dommages et intérêts ou ces intérêts continent-ils à courir jusqu'au résultat d'appel?

Les documents sous astreinte ne m'ayant pas été donné à date, l'appel à t-il une incidence sur cette astreinte ou court-elle encore jusqu'à l'appel?

Enfin qu'elles sont les conséquences du paiement d'une exécution provisoire incomplète?

Merci par avance de votre savoir.

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Posté le Le 29/03/2025 à 19:09
Bonjour,

Votre situation met en lumière plusieurs points sensibles du droit prud’homal, notamment lorsqu’un jugement est assorti de l’exécution provisoire et qu’un appel est formé. Je vais vous répondre point par point, de façon claire et structurée.

Tout d’abord, les intérêts légaux. Lorsqu’un jugement condamne un employeur à verser des sommes au salarié, deux régimes coexistent : pour les créances de nature salariale (salaires, indemnités de congés payés, rappels...), les intérêts légaux courent de plein droit à compter du prononcé du jugement. Pour les dommages et intérêts, les intérêts ne courent qu’à compter de la notification du jugement à l’employeur. Le fait que ce dernier ait interjeté appel ne suspend pas ces intérêts, tant que les sommes ne sont pas réglées. Ils continuent donc à courir jusqu’au paiement complet, même pendant la procédure d’appel.

Concernant l’astreinte liée à la remise de documents, si le jugement prévoit une exécution provisoire de cette obligation, celle-ci est immédiatement applicable. L’astreinte commence donc à courir à l’expiration du délai fixé par le jugement — en l’occurrence, deux mois après notification — et se poursuit tant que les documents ne sont pas remis. Là encore, le simple fait d’interjeter appel ne suspend pas cette obligation, sauf décision expresse de la cour d’appel ou du juge de l’exécution.

Enfin, s’agissant du paiement partiel de l’exécution provisoire : ce paiement ne rend pas l’appel nul en soi, mais il n’est pas sans conséquence. En droit du travail, un appelant qui ne justifie pas avoir exécuté le jugement assorti de l’exécution provisoire s’expose à une demande d’irrecevabilité de son appel par la partie adverse, en application de l’article R. 1453-1 du Code du travail. Il ne s’agit pas d’une nullité automatique, mais d’une sanction que vous pouvez solliciter, et que la cour d’appel appréciera. Un paiement partiel peut être jugé insuffisant si l’employeur n’a pas exécuté les obligations les plus certaines et les plus urgentes (notamment les salaires), ce qui peut fragiliser la recevabilité de son appel.

Cela dit, il est essentiel de souligner que la procédure d’appel, en matière prud’homale, est aujourd’hui particulièrement technique. Depuis la réforme de 2019, l’appel doit être formé selon des règles procédurales strictes, dans des délais encadrés, avec représentation obligatoire par avocat devant la cour d’appel. Cette représentation n’était pas toujours exigée par le passé, mais elle l’est désormais dans presque tous les cas, et elle conditionne la recevabilité des actes. C’est pourquoi je vous recommande vivement de vous faire accompagner par un avocat spécialisé en droit social, notamment si vous souhaitez soulever la question de l’astreinte, des intérêts ou de l’irrecevabilité de l’appel.

Un avocat saura présenter efficacement ces arguments, dans le respect du formalisme de la procédure d’appel.

Posté le Le 30/03/2025 à 08:03
Bonjour et merci pour ces éclaircissements.

Concernant l'astreinte pour délai de production de document, j'en ai saisi les aboutissants et vous en remercie.

Pour ce qui est de l'irrecevabilité de l'appel, j'ai bien peur que le fait que l'employeur se soit acquitté d'une partie des montants à hauteur d'environ 80% ne prouve pas une réelle mauvaise fois et risque de ne pas être retenue j'imagine.

Enfin, je vous sollicite à nouveau pour un complément d'information concernant les intérêts légaux.

Si j'ai bien compris les dates à compté desquelles ces intérêts ont commencé à courir j'ai plus de mal a être certains de leurs fins. En effet, d'après ce que j'ai compris dans vos propos, ces intérêts cesseraient a partir du moment ou l’exécution provisoire est réglée. Toutefois, étant entendu que les sommes allouées au titre de cette exécution, bien qu'étant en ma possession ne m'appartiennent pas vraiment jusqu’à expiration des voies de recours.

Que deviennent les intérêts entre la date de paiement de l'exécution provisoire, fut-elle incomplète la confirmation du jugement en appel ?

Concernant ces intérêts et l'astreinte, j'imagine qu'il faut attendre le résultat de l'appel, attendre une éventuelle demande de cassation puis procéder à la demande de liquidation de ces sommes ?

Merci encore pour vos réponses et pour prendre votre temps que j'imagine précieux. bien cdt

Posté le Le 30/03/2025 à 10:20
Bonjour,

Sur l’irrecevabilité de l’appel, votre analyse est juste : si l’employeur a exécuté 80 % des condamnations, la mauvaise foi sera difficile à démontrer. Il ne s’agit pas, en effet, d’un manquement manifeste ou total. La cour d’appel apprécie dans ces cas l’importance de la part non exécutée et les raisons éventuellement invoquées. Rien ne vous empêche toutefois de signaler cette exécution partielle dans vos écritures, car cela peut peser sur l’appréciation générale de la diligence de l’employeur.

Concernant maintenant les intérêts légaux, vous soulevez un point très pertinent : celui de leur fin.

En principe, les intérêts légaux courent jusqu’au paiement effectif des sommes dues, que ce soit au titre de l’exécution provisoire ou après décision définitive. Donc, lorsqu’une somme vous est versée dans le cadre de l’exécution provisoire, les intérêts cessent de courir sur ce montant à la date de paiement, même si la procédure d’appel est en cours.

L’idée, juridiquement, est simple : les intérêts compensent le préjudice lié au retard de paiement. Une fois la somme réglée, ce préjudice n’existe plus, et les intérêts s’arrêtent de courir. Le fait que cette somme puisse, en théorie, devoir être restituée en cas d’infirmation du jugement en appel ne modifie pas ce principe : c’est une autre logique (celle de la répétition de l’indu, qui suppose un arrêt infirmatif), mais ce risque n’a pas d’effet suspensif sur le calcul des intérêts.

Autrement dit : une fois la somme entre vos mains, les intérêts s’arrêtent à cette date de paiement. Si la cour d’appel confirme le jugement, il n’y aura pas de nouveaux intérêts sur cette somme, sauf si d’autres condamnations sont prononcées. Si elle infirme, et que vous devez rembourser une partie des sommes, il pourra alors être question d’intérêts sur les sommes à restituer… mais dans l’autre sens.

Quant à l’astreinte et à la liquidation des intérêts restés dus, vous avez là encore raison : il convient d’attendre que la procédure d’appel soit définitivement close, voire que les voies de recours extraordinaires (comme le pourvoi en cassation) soient épuisées. C’est à ce moment-là que vous pourrez engager une demande de liquidation de l’astreinte devant le juge de l’exécution (JEX) si elle n’a pas été réglée, ou faire calculer les intérêts résiduels restés dus sur les montants impayés.

D’ici là, je vous encourage à conserver tous les justificatifs de paiement, de notification, et à établir précisément un relevé chronologique des sommes perçues et des dates, ce qui facilitera grandement la liquidation.

Je vous renouvelle mon conseil de vous faire accompagner dans cette phase par un avocat, car la liquidation des intérêts ou de l’astreinte nécessite une présentation rigoureuse et conforme au formalisme de la procédure d’exécution.

Posté le Le 31/03/2025 à 11:53
Voilà qui est très clair !

Je vous remercie vivement pour vos réponses détaillées.

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